Le premier week-end voit ma première chute. J'emmène ma fille voir les hordes de motos au retour du dernier Bol d'or au Castellet (je
ne l'aurai jamais vu sur ce circuit, mon Bol ultime était encore au Mans, et ma dernière présence sur cette piste est pour le MJ 200 !). Un scooter est par terre dans un rond point et les
véhicules tournent autour sans s'arrêter. Je me dirige vers ce point pour me mettre en protection de la jeune fille au sol, quand nous nous retrouvons à notre tour étendus, la moto couchée à
contre sens. Le rond point est maculé de gas-oil ! Nous prévenons les secours (pas de blessés mais nécessité de traiter cette patinoire). Nous attendrons plus d'une heure la DDE qui nettoie
l'ensemble des ronds points de la ville. Pendant ce temps, ma fille et moi balisons le terrain pour prévenir les dizaines de motos s'engageant dans ce piège. Nous repartirons avec quelques
légères contusions et un cabochon de clignotant cassé.
L'utilisation de la première année est avant tout professionnelle et familiale.
Même si les débuts avec cette nouvelle machine ont été déroutants, je commence à en prendre la mesure.
Hormis pour de long trajet, la Diversion n'est vraiment bonne nulle part. Dans les grandes courbes elle "saucissonne" joyeusement, son
freinage est loin d'être optimum, dans les "petits coins" il faut se battre avec son poids et sa linéarité moteur oblige à tricoter du sélecteur quand le rythme est soutenu. A contrario, elle
n'est vraiment mauvaise dans aucun domaine et pardonne même de nombreuses fautes d'appréciation ou de pilotage.
Des le départ, je l'ai équipé de protège-carter d'une housse de réservoir avec double sacoche et d'un top-case. Rapidement, je
complèterai l'équipement par l'adjonction de valises rigides et d'une bulle haute.
J'ai la chance de bénéficier de l'entraînement de motards aguerris qui acceptent de me
traîner comme un boulet que je suis et qui m'ont sagement "tiré" ou attendu dans les tourniquets Cévenols et Ardéchois. Je pense particulièrement à la petite équipe issue de Tissot motos que je
remercie encore ici. Sans leur patience et leurs conseils, je n'aurais pas acquis si rapidement la confiance nécessaire à une meilleure maîtrise. Par la suite, j'aurais souvent l'occasion, et le
plaisir, de transmettre à mon tour le fruit de l'expérience.
Dans cette période de renouveau de ma vie motocycliste, j'accumule nouvelles rencontres, virées mémorables et fous délires.
Ma fille de 14 ans devient ma passagère privilégiée. Elle m'accompagne sur les circuits, en concentrations, voyages et balades. Elle
devient tellement "accro" qu'il lui arrive fréquemment de s'endormir derrière moi. Lorsque son casque se pose entre mes épaules, je sais que je dois faire "soft".
Néanmoins, elle me fera très peur, du côté de Brive au retour d'une concentration à La Bachellerie-24 (Salut à vous Marie-Pierre et
Patrick. Que de bons et inoubliables moments passés !). Elle sera sur le point de tomber dans une sortie de rond point, emportée dans sa torpeur et glissant de la selle . Après cette aventure, je
ferai plusieurs dizaines de kilomètres d'une seule main sur une route viroleuse, du côté de Rodez (merci au motard de la police qui m'avait appris à rouler sans embrayage lorsque ce dernier
m'avait lâché sur mon 350 Honda en 73 !). En effet, je tiens son bras de ma main gauche (elle ne peut pas partir à droite) et mon coude gauche l'empêche de basculer à gauche. Par la suite,
lorsque les conditions le permettent, un sangle servira à "arrimer mon SDS (Sac De Sable)" à son père indigne.
Cette technique donnera lieu a un échange verbal d'anthologie pendant un arrêt-café (Les Vans-07) au petit matin d'une sortie en
Cévennes avec quelques copains, alors que je suggère à ma fille de prendre un Cola pour se réveiller :
-
Tu sais Papa, je n'aime pas trop quand je suis attachée.
-
Si je fais ça, c'est pour éviter de te perdre quand tu somnoles. Mais pourquoi me dis-tu ça ?
-
Eh bien, tu roules plus vite.
-
Oui, sans aller vraiment vite, je peux enrouler plus rapidement puisque tu es solidaire de moi. Par contre, je ne comprends pas cette réflexion alors que tu me
demandes souvent plus de vitesse.
-
C'est vrai. Ce n'est pas pour la vitesse. Mais lorsque j'ouvre les yeux dans certains courbes, la route, elle n'est vraiment pas loin ! ! !
Notre "couple" donne parfois lieu à des situations ambiguës et nous surprenons souvent des regards dénués de sympathie. Ainsi, lors de
notre installation sur le circuit des 24 heures, au Mans, nous échangeons des services avec une bandes de jeunes voisins de camping. Le soir, lors d'un apéro convivial, nous nous présentons comme
père et fille. Une remarque d'une jeune femme fuse à l'intention de son compagnon :
-
Alors, tu vois, j'avais raison.
Je me tourne vers l'intéressé et l'apostrophe vertement :
-
Tu me prenais certainement pour un vieux pervers qui se sortait une jeunette ?
Embarrassé, il tente de s'expliquer, puis s'aperçoit qu'en fait nous rigolons bien de cette situation que nous vivons de temps en
temps.
Pour les vacances de février nous entamons un tour de France.
Première escale, un coucou à l'arrière Grand Mère en Bourgogne (il s'agira en fait d'une de nos dernière visite avant son
décès).
Ensuite direction Paris. Au cours de cette étape, nous rencontrons notre première et seule panne de notre interphone "TUYAUCOM". Dans
la traversée du Morvan, nous avons froid et nous ne nous entendons plus. Nous nous arrêtons pour boire chaud et vérifier les connexions de ce système simpliste mais efficace. En descendant de la
moto, ma combinaison de glace se craquelle et se répand au sol. Il faisait effectivement très froid dans ce léger brouillard ! En fait, la vapeur d'eau a gelé dans les tuyaux et la glace forme
bouchon ! ! ! Avec le dégel, c'est réparé.
De Paris nous rejoignons la Bretagne pour quatre jours. Le temps est relativement sec et pas trop froid. Chaque jour nous visitons
toute la côte nord. Nous profiterons même d'un magnifique soleil à Cancale pour s'installer dans la véranda d'un restaurant et littéralement piller un somptueux plateau de fruits de mer.
Notre route se poursuit vers Poitiers ou les cousins font des "tours de manège" sur la moto du Tonton. Nous terminons par une halte en
banlieue Toulousaine avant de rejoindre l'Ardèche par la côte méditerranéenne.
Ma fille se plaindra parfois de son séant maltraité mais aura tout de même fait plus de 50 000 kilomètres derrière son "vieux",
et dans toutes les conditions possibles.
Je reçois aussi plusieurs groupes de motards dans mon gîte.
Deux m'ont particulièrement marqués :
Ø Le premier est le HOG (Harley Davidson) de Lyon pour lequel je réalise un gâteau particulier. Avec l'aide de mon fils pour le dessin (ce n'est pas
mon fort), je reproduis avec succès le symbole (l'aigle) en pâte d'amande et chocolat. Ce décor trône fièrement sur l'imposante pâtisserie composée de génoise, poires et ganache ! Une équipe
pleine de bonne humeur qui a offert un tour de Harley à mes enfants.
Ø Le second vient de Metz. Ils garderont un souvenir cuisant (au sens véritable du terme) d'une descente de l'Ardèche en canoë. Pour la majorité,
pourtant prévenus, cela se terminera en pharmacie ou à l'hôpital vu l'étendue et la profondeur de certaines brûlures provoquées par un soleil resplendissant. Martine(s), Serge(s), Catherine,
Didier, Carole, … tant de gens que je reverrai, à Metz, dans la Meuse ou en Auvergne, et dans des conditions aussi diverses que des jours de l'an, des voyages, l'épiphanie (Martine se souvient
certainement des galettes frangipanes).
Premier Bol d'Or à Nevers et première grande sortie moto pour ma fille. Nous partons le vendredi au petit matin. Dans l'ascension du
col de la république la moto navigue dangereusement, emportée par des gesticulation de ma passagère. Arrêt rapide, ne sachant pas ce qu'il se passe. Ma fille voulant humer l'air ambiant a ouvert
sa visière. Cette dernière en a profité pour prendre la poudre d'escampette, arrachée de son support. Dans une station service nous scotchons un écran de fortune devant le trou béant. Arrêts chez
trois motocistes en route, mais aucun n'a de visière pour ce modèle. Ma fille n'aura qu'un spectacle très troublé de notre environnement.
Pour la première soirée ma fille est tendue. Elle vient de vivre un épisode difficile de sa vie lors d'un camp de vacances et je crois
que le fait de se retrouver sous la tente l'angoisse. Nous en discutons. En fait, ce qui l'inquiète c'est plutôt le nombre de personnes ayant trop bu. Je lui explique que nous restons
ensemble et que je n'ai jamais vu d'incident grave engendré par cet état de fait. La conclusion s'exprimera d'ailleurs le lendemain soir par une jeune fille bien détendue :
-
Tu avais raison pour toutes ces personnes trop alcoolisées. Soit ils rigolent, soit ils s'écroulent et dorment dans un coin. Ils ne nous embêtent pas et tout va
bien.
Le samedi, nous nous rendons chez Moto Expert à Nevers. Ils n'ont pas de visière en stock mais prennent un écran sur un casque neuf.
Merci encore à eux pour leur gentillesse. Ma passagère a fait un retour beaucoup plus confortable.
Ma vie personnelle évolue aussi et, suite à une séparation, je déménage à Montélimar.
Je profite de mon dernier week-end au gîte pour organiser un petit déjeuner en prélude à une virée à la première course de
Super-motard d'Alès. Nous sommes une vingtaine dont des "durs" qui seront des compagnons de nombreuses et diverses sorties. En vrac, en espérant ne pas vexer ceux que j'oublierais, René (XJR 1300
puis Fazer 1000), "Papy" (Harley), Jean-Claude (Honda CB), Jean-Pierre (600 ZZR puis 750 VFR)
Dans ma nouvelle vie se pose la question du véhicule. La réponse est vite trouvée. Je ne rachète pas de voiture et décide de rattraper
tout ce temps passé sans moto.
Cette nouvelle vie s'accompagne d'un élargissement rapide du cercle des compagnons de sorties. Je découvre doucement de nouveaux
personnages, et le processus s'accélèrent lorsque nous organisons des manifestations moto comme pour le Téléthon. Pour les balades, les groupes
enflent rapidement, et il ne sera pas rare de partir à plus de trente motos.
Au cours de mes pérégrinations, je rencontre de nombreux autre motards, simplement croisés ou avec lesquels l'histoire continuera. Je
pense particulièrement à des équipes découvertes au Mans ou à Magny Cours. Pascal et William de Bretagne, Fred et Marvine de La Rochelle, Jacky, son frère et leurs copains de Sologne.
Je songe aussi à ce dimanche de novembre gris et humide ou je me propulse à Bollène (84) pour une fête de la moto. J'ai la chance et
le plaisir de gagner le rallye bon enfant organisé à cette occasion. J'y rencontre différents membres de ce club des Bélugues, et en particulier Zézé et Victor avec leurs magnifiques QUATRE
PATTES (750 Honda), mais aussi Martine et Carlo, Monique et Marc, Gilbert, Patricia, Ghislaine et Alain, ... . L'ambiance me plaît et je
participerai à la vie de cette joyeuse équipe jusqu'à mon départ de la région.
Pourtant, à la première sortie je suis pris d'un doute. Sur la quinzaine de participants, je note un "ancien" en BMW R90S et un autre
intervenant en 250 NX. La balade promet d'être "pépére" !
Que nenni, Alfred et André se révélerons de redoutables motards aguerris avec lesquels nous effectuerons de nombreuses virées et
voyages, toujours dans la bonne humeur et souvent dans la gentille arsouille.
Je dois passer les fêtes de Noël à Paris, en famille. Je scrute la météo car il fait froid et les prévisions sont exécrables. Si je
pars en début d'après midi je dois pouvoir passer entre deux fronts neigeux. Si mon boulot m'accapare énormément l'été, pendant les récoltes de fruits, je suis plus libre de m'organiser en saison
creuse. Pour minimiser les risques, et ne pas rester trop longtemps aux intempéries, je prends l'autoroute. Le froid est pernicieux, mais très légèrement positif et un magnifique soleil
m'accompagne jusqu'à Beaune.
La montée du Morvan annonce l'arrivée de la seconde perturbation. Le brouillard s'installe, s'intensifie avec l'altitude et les
températures s'inversent. J'envisage de m'arrêter à la station du sommet pour enfiler la tenue pluie, mais arrivé à ce niveau, j'escompte sur une amélioration sur l'autre versant et continue.
Erreur. Je suis contraint de stopper à l'aire suivante, couvert de glace.
Je salue le seul motard présent qui finit son plein, boit un café et me ré-équipe. Je repars sous une légère neige. La tension est là,
mais je profite tout de même des somptueux paysages hivernaux, des arbres gangués de glace, de la campagne qui blanchit. La chaussée est mouillée mais dégagée.
Une vingtaine de kilomètres plus loin j'aperçoit le motard de tout à l'heure arrêté sur la bande d'arrêt d'urgence. Le jour tombe. Je
stoppe derrière lui en warning et m'enquièrs de son problème. Sa machine a calé et refuse de redémarrer. Nous essuyons les fils de bougies, ré-essayons de démarrer, poussons, mais rien n'y fait.
Il téléphone à des amis qui peuvent venir le chercher. Je trouve dangereux de le laisser là et lui propose de l'emmener jusqu'au prochain péage ce qui arrange tout le monde. Nous garons la moto
en contrebas contre le grillage et je repars avec mon nouveau passager.
La reprise de mon périple s'effectue de nuit dans une tempête de neige. J'ai la chance de me trouver rapidement derrière un engin de
déblaiement et peut donc rouler, pas très vite, mais en relative confiance. Je suis obligé de m'arrêter fréquemment pour me réchauffer, boire un arabica et … évacuer les précédents cafés.
L'asphalte est à peu près dégagée et le rythme est soutenu, au moins vis à vis de ces conditions. Pendant un dépassement, je suis pris
d'un doute et passe en plein phare. Surprise, la voie de gauche sur laquelle je roule est uniformément blanche. Mon regard se porte vers le compteur. Stupeur, je frôle les 160 km/h. Il me faudra
2 ou 3 kilomètres pour me rabattre, tout en douceur et repasser en "mode lopette". La frayeur est salutaire. Je continue ainsi dans les bourrasques et les projections des camions jusqu'au niveau
de Fontainebleau ou la neige se transforme en pluie. J'arrive dans le Val d'Oise vers 23 heures, transi. J'ai un mal fou à me réchauffer et à m'endormir. Le lendemain matin, les faces externes de
mes cuisses sont encore froides ! ! !
Pour le 1er janvier, j'ai rendez-vous à Metz avec le MC des Alérions (mes anciens clients du gîte). Les prévisions météo
ordonnent mon départ le 30 décembre et je peux rallier l'est de la France sur des routes humides et glissantes, mais sans pluie et avec des températures légèrement positives.
Arrivé sur place, désirant ne déranger personne, je m'installe dans un petit hôtel. Le lendemain matin, réveil surprise. La moto est
recouverte d'une vingtaine de centimètres de neige. Je pense que nous sommes dans un pays habitué à ces conditions et je pars prendre mon petit déjeuner relativement serein. Les routes devraient
être dégagées rapidement.
Vers 10 heures, appel téléphonique de Brigitte :
-
Salut Patrice, nous avons un problème ici.
-
Ah oui, êtes-vous sous la neige ?
-
Oui, mais comment le sais-tu ?
-
Je suis arrivé hier soir et viens de constater l'étendue du problème.
-
Alors c'est bien toi qui a doublé Martine et Didier hier soir. Ils nous ont appelés pour savoir si tu étais chez nous. Quand nous lui avons dit que tu n'étais pas
là, nous avons trouvé étonnant de tomber justement sur une Diversion bleue et immatriculée 07 ! ! ! Enfin, Didier propose de venir te chercher avec son 4x4.
-
Je pense que cela ira mieux en début d'après midi. Je vous rappelle si ce n'est pas le cas.
En fait je peux repartir, après quelques essais non chargé sur le parking. Je dois faire un vingtaine de kilomètres pour rejoindre le
lieu de la fête. Les grands axes sont bien dégagés, mais les routes secondaires sont encore scabreuses. Une forte montée se négocie dans les ornières de neige et la fin du parcours se traite avec
circonspection sur une surface totalement blanche. Second rapport au ralenti, les 2 bottes au sol et arrivée sans encombres. Le réveillon se passe superbement, hormis quelques mauvaises langues
qui surveillent les chutes de neige et s'interrogent effrontément sur ceux qui sont venus sur deux roues (je suis le seul bien sûr). En fait, ces railleurs en seront pour leurs frais. La météo
évolue favorablement et je peux rallier Montélimar dans un froid acceptable et sans chutes de pluie ou de neige.
Les 24 heures du Mans marquent le redémarrage de la saison sportive et nous avons rendez-vous sur le circuit avec Serge qui vient de
Metz avec son magnifique 750 GSXR (1er modèle). Ma fille marque un certain intérêt pour une moto verte pilotée par un certain Bertrand Sebileau. Ce sentiment évolue en admiration
lorsque "Fast'Sebil" nous reçoit très gentiment dans son stand, discute deux minutes et lui dédicace un poster. Elle sera fébrile en suivant toute la course, et particulièrement à la sortie de
l'enchaînement du "Chemin aux bœufs". Le funambule optimise sa sortie, à chaque tour. La puissante accélération écrase l'amortisseur et la machine réagit tellement que dans les premiers tours
nous pensions voir les prémices d'une magistrale chute. En fait, le grand Sebileau démontre son incroyable contrôle et optimise ses relances (Blanco, quelques années plus tard, ton poulain aurait
dû profiter de la parfaite maîtrise de ce passage ! ! !).
Pour notre dernière nuit sur le circuit, je décide d'aider le sommeil à l'aide d'un demi cachet magique. En effet la route sera longue
le lendemain et je veux être reposé. Serge, qui doit redescendre avec moi sur Montélimar hésite puis fait comme moi. Après une excellente nuit, nous apprenons les sévices procurés par notre jeune
voisin Solognot. Comme il ne n'acceptait pas que nous nous couchions trop tôt, il a multiplié les concerts de rupteur et de cris associés à des actes vindicatifs sur notre toile. Nous n'avons
rien entendu, rien senti. Serge aura le mot de la fin, avec une mine ébahie, provoquant un immense éclat de rire de notre petite troupe :
-
C'est une belle c****rie cette idée de médicaments. Il arrivait quoi que ce soit à la petite et nous n'étions même pas opérationnels.
Le retour s'effectue sur nationales et autoroutes à un train de sénateur. J'ai un mal fou à entraîner Serge qui m'a prévenu. Il roule
à la vitesse des "péteux", c'est à dire à 10 ou 20 km/h au dessus des limitations.
Lors d'un ravitaillement en Auvergne nous nous trouvons devant un pompiste désemparé. Un de ses client motard vient d'être évacué par
les pompiers suite à un malaise et il n'ose pas toucher à la moto restée au milieu de la piste. Nous prenons en charge la BMW esseulée pour la mettre à l'abri d'éventuelles convoitises et/ou
intempéries.
Sur la fin du parcours, sur l'A7, une jeune femme joue avec nous pendant plusieurs dizaines de kilomètres. Elle nous dépasse, se rabat
et ralentit, nous obligeant à la dépasser à nouveau. Au niveau de Loriol, Serge craque, oublie totalement son précepte de "vitesse des péteux" et visse sa poignée droite. Nous devons bientôt
sortir et je tente de le rattraper. Peine perdue. La Diversion lourdement chargée se fait immédiatement distancée par ce furieux le nez dans la bulle. Il ne voit même pas mes multiples appels de
phare. Il me reste à espérer qu'il s'arrêtera en voyant la mer ! ! ! En fait, à l'annonce de Montélimar, il m'attendra bien sagement. Inutile de vous dire que nous n'avons pas revu notre
compétitrice.
Cette semaine de travail est très courte car nous repartons le jeudi pour un long périple de 4 jours. L'objectif est de rallier la
Dordogne pour la concentration du MC les Cromagnons. Mais auparavant nous faisons un détour par le Cantal ou nous avons rendez-vous avec le MC les Alérions de Metz. La petite équipe est
hétéroclite. René et son XJR 1300, Néné et sa compagne Stéphanie en 1100 GSXR, Fabien et sa passagère sur la Suzuki SRAD, Serge et son 750 GSXR, Jean-Pierre en 750 VFR et ma fidèle Diversion pour
ma fille et moi.
La route s'enroule gentiment jusque dans le Cantal. Là, Fabien et Néné découvre une route d'enfer que André baptisera plus tard "la
route à bonheur" (section Murat-Riom es montagne). Ils partent tout les deux devant pour une arsouille mémorable. Cette ardeur est vite calmée par une inquiétante barre noire dans le ciel. Un
arrêt providentiel pour s'équiper des tenues pluie avant de s'engouffrer sous un déluge hallucinant. Nous arrivons dégoulinants au gîte à Champs sur Tarentaine où nous retrouvons les
Messins.
Le lendemain nous repartons sans Serge qui reste avec ses collègues. Rapidement, devant des enchaînements de courbes affriolants, Néné
et Fabien repartent comme sur un circuit. Nous les rattraperons néanmoins très vite. Nous sommes étonnés de les voir ainsi, bien sagement derrière un break. En nous rapprochant, nous discernons
la lucarne pour l'appareil photo ! ! ! ces gendarmes nous promènent quelques kilomètres puis nous font signe de passer.
Nous aurons des averses tout le week-end, mais une chaude ambiance, notamment grâce à la tonitruante participation du MC Les Escargots
d'Isère.
C'est au retour de cette concentration que j'aurai ma grande peur de sentir ma fille commencer à tomber de la moto.
Ma seconde chute intervient lors d'une balade en Drôme Provençale. Le soleil est radieux, les cigales chantent et je viens de me
déguster un café en terrasse après la visite du petit village. L'esprit bucolique, je m'équipe, enfourche mon fidèle destrier et démarre avec panache devant les consommateurs envieux de cette
terrasse. La frime ne dure qu'un instant. J'ai oublié les plots de pierre et j'en accroche un violemment. Machine et bonhomme au sol. Les spectateurs semblent inquiets et certains se lèvent pour
venir me "secourir". En fait, ni la bécane, ni le "kéké" ne sont abîmés. Seul l'ego en prend un coup et je suis content de porter un casque intégral qui camoufle la rougeur honteuse du visage. Je
repars plus calmement sous certains sourires narquois.
Un dimanche matin de printemps encore frais, nous avons rendez-vous au bar "Les Négociants" à Montélimar pour prendre le café
préliminaire essentiel à une bonne balade. Je pense être le premier mais un motard inconnu est posté au comptoir. J'engage la conversation, songeant qu'il a pu être prévenu par un de mes
acolytes. En fait il est là par hasard, mais semble intéressé par cette sortie. Il enfourche rapidement son TDM pour se procurer un pique nique et passe la journée avec nous. Je fais ainsi
connaissance avec Fabrice qui sera un compagnon de nombreuses routes et histoires.
La dernière véritable chute sera aussi pour cette machine. De nouveau un départ fanfaron, mais cette fois avec le U dans la roue
avant. Tout l'équipage au sol avec pour seule conséquence un câble de compteur cassé.
Au bout de 18 mois, la machine flirte avec les 100 000 km et je m'inquiète de sa longévité (bien à tort d'ailleurs). J'essaie la
Yamaha FJR 1300, superbe bécane, mais qui me déçoit rapidement par sa rapidité à frotter en courbe. De plus l'investissement est à peu près du double. Investissement que j'estime obsolète en 2 à
3 ans ! ! !
Toujours avec ma contrainte de cardan, je teste une Pan Euro. et louche vers les BMW. Les budgets sont similaires à la FJR.
De plus, Tissot moto a toujours honoré ses engagements, et je suis enclin à poursuivre cette relation qui est devenue autant
professionnelle qu'amicale.
Un samedi matin de février 2001 je réveille ma fille vers 10H00 en lui demandant de se préparer pour aller faire des courses. A midi
et demi, nous avons fait une offre pour un appartement dont nous prendrons possession 2 mois plus tard et conclu la reprise de la Diversion bleue pour l'achat d'une rouge.
Pour fêter tout ça nous nous offrons un petit restaurant et ma fille conclut cette matinée comme suit :
-
Eh bien, quand tu dis que tu dois faire 2 ou 3 courses, tu ne fais pas semblant !