Samedi 20 avril
Je ne vais pas vous conter la course …
D'une part, d'autres le font bien mieux que moi …
Et d'autre part, je ne peux la suivre que par intermittence et surtout, je suis focalisé sur la #38 et la vie du team.
Mais je vais tenter de vous faire partager ces moments … ou de vous les faire revivre pour ceux qui y étaient …
Comme d'habitude, j'arrive de bonne heure au box pour reprendre contact avec les internautes, au calme.
Puis la lumière pointe son nez sur la Pit-Lane encore bien paisible. Le soleil monte à l'assaut des cieux, les tribunes vides s'illuminent et les premiers véhicules d'intervention partent prendre leurs postes autour du circuit.
Le box 55 s'anime aussi peu à peu. D'abord Manu suivi de Fred et, rapidement, toute l'équipe se met en place pour le warm-up, dernière séance de réglages pour les pilotes et la machine, bien sûr, mais aussi pour chaque composante du team managé par un Ludo survolté !
En ce qui me concerne, je récupère une adjointe fort efficace en la personne de notre "Umbrella Girl" de la veille. En effet, Nolwenn me surveille et détecte rapidement quelques erreurs dans mes textes comme une certaine tendance à la dyslexie à la frappe sur le clavier …
Sa Maman, Fabienne "The Boss of this Team" est beaucoup moins disponible, accaparée par ses missions, et entre autres, pour l'instant, au chronométrage.
La jeune fille se prend d'autant plus au jeu qu'elle accepte ma proposition de devenir mon assistante communication, ce qu'elle met rapidement en œuvre en validant mes choix de photos ou formulations !
Le warm-up se déroule à merveille. Les pilotes sont en confiance, pressés d'aller en découdre et chaque composante de l'équipe gère parfaitement son domaine dans une coordination administrée avec rigueur par Fred.
Le dernier repas est rapidement servi à l'hospitality dans une ambiance studieuse mâtinée d'une certaine euphorie.
Puis c'est la présentation des équipes sur la piste, l'hymne national entonné à l'unisson par les milliers de spectateurs et la mise en grille des machines ... avec un 'Umbrella Boy" de choc !
En raison de sombres pièges administratifs, c'est Axel qui va prendre le départ en lieu et place d'Eddy.
Le silence se fait dans l'attente du départ, brisé par le grondement de deux rafales Marine, crosses d'appontage bien visibles, qui survolent les équipages en épi.
Puis les pilotes s'élancent vers les 59 machines alignées et c'est maintenant les hurlements des moteurs qui emplissent l'espace.
Avec trois vues de 24 heures Moto.
Le pack s'engouffre dans le premier enchaînement, "La Dunlop" et la première chute se produit …
Immédiatement, une clameur d'abattement retentit au sein du box 55. La #38 est au sol, percutée par un autre concurrent …
Quelques secondes de course et tous les efforts se trouvent anéantis …
Mais, en direct sur les écrans, Axel se relève, prend en charge sa monture et peut repartir.
Avec Bruno, nous faisons évacuer le box de toutes les personnes non indispensables afin de procurer à l'équipe technique un univers le plus serein possible.
La moto rentre dans le box, chiffonnée … et entourée des officiels et équipe de télévision.
Elle est auscultée par les mécanos afin de vérifier tous les organes vitaux, les éléments de carénage sont changés et la ronde peut reprendre, mais au fin-fond du classement.
Il me faut aussi consoler ma petite assistante, Nolwenn, et lui expliquer que la course est loin d'être terminée, que beaucoup de choses peuvent se passer, favorables ou non d'ailleurs.
Commence alors la fastidieuse remontée.
Axel se démène et à 15h59 il passe le relais à un Eddy aussi pensif que confiant.
Le premier tour d'horloge marque son entrée en piste en 52ème position, déjà 7 équipages sont derrière !
A 16h50, Alan se prépare à prendre son relais. La roue arrière est promptement changée et il peut repartir à 16h57.
A la seconde heure de course, il pointe en 46ème position …
Les relais s'enchaînent avec quelques soucis de batterie, mais les mécanos s'emploient à réduire les temps d'intervention avec autant de calme que d'efficacité.
De leurs côtés, les pilotes bataillent avec pugnacité et grappillent secondes après secondes.
Ils en sont même étonnants de régularité et de cohérence.
A la 4ème heure de course, la #38 est à la 50ème place, et à 19h05 Eddy peut laisser le champ libre à Alan après le changement des deux roues.
Peu à peu, la lumière décline sur le Bugatti et à 20h55, c'est au tour d'Axel de prendre la suite d'Alan qui apparait à la 6ème heure de course en 45ème position.
Si ces relais sont retransmis en "live" par Nonocam, Camille me gêne à chaque fois avec sa perche qui lui permet d'enregistrer ces actions avec sa caméra 360°.
Enfin ce n'est pas elle qui me gêne (la pauvrette, elle est si gentille), mais sa perche qui est fréquemment dans le viseur ! ! !
A 21h45, Eddy se prépare pour son prochain relais. Sur la Pit-Lane, personnels et matériels sont positionnés.
Alors qu'Axel va rentrer, les Safety-cars sortent pour geler la course à la suite d'un incident.
En éminent stratège, Fred Protat prend immédiatement la décision de faire rentrer la machine au box pour pratiquer une maintenance plus lourde qu'un simple ravitaillement.
En effet, seules 4 personnes peuvent intervenir sur la machine en Pit-Lane alors que ce nombre n'est pas limité dans le box.
Ainsi, la perte de temps est minime par rapport à la course qui est fortement ralentie.
10 minutes après son départ, Eddy est pointé en 41ème position à la 7ème heure de course.
La nuit est maintenant bien installée.
A 22h47, Eddy rentre, un ravitaillement express est opéré et Alan repart … sur quelques mètres …
Il faut à nouveau rentrer la machine dans le box pour rétablir un dysfonctionnement de batterie.
Néanmoins, l'action est rapide et Alan reprend la piste en maintenant la place antérieure de 41ème.
Et nos trois pilotes, comme la moto, savent remercier le dévouement du staff technique en évitant de les déranger alors qu'ils profitent des moments de calme pour voler quelques instants de détente ou repos !
23h43 Alan cède le guidon à Axel qui est toujours en 41ème position un quart d'heure plus tard à la 9ème heure de course.
La fatigue s'accumule pour tous, pilotes comme mécanos !
A minuit passé, Eddy, en avance pour son relais, semble aussi concentré que serein. Il échange, sourit, blague malgré l'heure avancée. Cette attitude est probablement générée, au moins en partie, par le tableau d'affichage qui annonce la #38 en … 35ème position soit 20ème dans sa catégorie (SST, Superstock).
Axel se démène sur la piste avant de laisser repartir son collègue qui a visiblement le couteau entre les dents.
A 1h30, c'est au tour d'Alan, après se l'être joué Yogi.
Bien que le ravitaillement soit rapide, il repart en perdant une place.
De mon côté, je converse fréquemment avec ma "Geekette" de voisine. Si nous suivons la même course et la même moto, nous en avons des vues complémentaires puisqu'elle se charge du "live", d'un point de vue technique, mais reste aussi à l'écoute des internautes.
Peu avant 2h30, Axel repart dans la ronde, alors qu'Alan a repris sa 35ème place, après une nouvelle intervention rapide des mécanos (2 roues et ravitaillement).
Cette rapidité alliée à une placidité apparente est déconcertante tant cela paraît simple à voir.
Et ce n'est vraiment pas pour se donner en spectacle, les tribunes sont quasiment vides !
3h30, Eddy reprend la direction des opérations alors que nous venons de passer la mi-course.
A la 12ème heure la moto du FGN Racing est 18ème de sa catégorie, mais à chaque tour, chacun des pilotes réduit l'écart avec ses concurrents placés devant …
Pendant ce temps, l'équipe logistique ne chôme pas non plus et surveille que chacun puisse se sustenter, de salades, viandes froides, charcuteries, boissons et même de fruits frais.
4h15, Eddy laisse sa place à Alan. Ces ravitaillements et changements de pilotes sont hyper rapides (c'est aussi là que des secondes sont gagnées … ou perdues) et pourtant, ce sont les seuls moments où les chronométreurs et panneauteurs peuvent souffler … un tout petit peu.
Par contre, comme tout roule parfaitement sur la piste, chacun peut prendre un peu de repos comme ici Fred (moins vrai pour les préposés aux pneus).
D'ailleurs, lorsqu'il voit la photo il oppose un démenti catégorique : " Je ne dors pas, je réfléchis" ! ! ! Don't act.
Vers 5h00, Axel prend le relais d'Alan.
A cette 14ème heure de course, le pointage indique une 31ème position au général (15ème SST).
La progression est aussi régulière que fulgurante et efficace !
Avec Bruno, nous devisons et j'exprime mon sentiment quant à la faisabilité d'un top 10 face au phénoménal travail de toute l'équipe.
Mais c'est au tour d'Alan de prendre la suite d'Axel qui lui laisse le guidon.
La fatigue est de plus en plus pesante pour tous et je m'organise avec Bruno pour m'absenter 1 heure et dormir un peu après 24 heures d'activité non-stop.
En réalité, je ne sommeille qu'une demi-heure et retrouve donc rapidement le box alors que le jour prend de l'ampleur.
7h50, le Renard (Eddy) part en chasse … dans cette remontée effrénée.
Pour cette 18ème heure, la #38 est 28ème (14ème SST).
Les relais se poursuivent, sans aucune anicroche, chacun donnant le meilleur de lui-même et la position dans le classement s'en ressent : 26ème au général (13ème SST) à la vingtième heure.
L'ambiance est au beau fixe avec cette remontée inespérée lors des premières secondes de la course. D'ailleurs, malgré des attitudes appliquées dans les actions, les pitreries fusent régulièrement …
C'est un signe !
De mon côté, je commence à abandonner l'espoir d'un top 10. Nos prédécesseurs sont trop loin pour être rejoints à la régulière …
A une heure de l'arrivée, la course en tête est complètement folle.
Les deux premiers, la Kawasaki #11et la Honda #111 se tiennent en 10 secondes et se disputent le commandement. Impressionnant.
Au FGN Racing, les relais s'accumulent avec une régularité de métronome, tant pour les mécanos que les pilotes et le score s'améliore encore : 23ème général (11ème SST) et chaque pilote entame sa dernière ronde.
14h48 les écrans nous montrent une machine qui fume énormément, se dandine, tombe et prend feu. Tous, nous redoutons la chute collective sur une piste probablement maculée d'huile mais les Safety-Cars interviennent immédiatement, sécurisant tant les pilotes que les commissaires qui nettoient la piste.
Cette moto est la #101, je vérifie instantanément sa position … Elle est devant nous, mais avec plusieurs tours d'avance.
Néanmoins, il est fort douteux qu'elle puisse repartir et dans ce cas, nous sommes 10ème SST !
A la relance de la course, il reste 8 minutes à tenir et c'est la Kawa qui remporte le dernier duel sur la Honda.
Toutes les équipes se massent sur la Pit-Lane pour ovationner les pilotes. Malheureusement, hormis les 3 premiers, ils sont tous détournés vers le parc fermé. Dommage.
En ce qui nous concerne, nous restons avec un panneau qui annonce l'arrivée d'Alan en 23ème position … soit 11ème SST …
Il nous faut rapidement démonter le box, mais avant de débrancher, j'examine le site officiel et constate la bonne nouvelle :
10ème SST
L'émotion déjà grande et palpable en est décuplée et particulièrement pour Nolwenn qui vit là une expérience fantastique propre à accroitre sa combativité …
C'est du vécu, même quand tout semble perdu, il peut subsister de l'espoir !
Pour terminer cette longue diatribe, je vous propose le texte adressé deux jours plus tard à toute l'équipe, mais aussi aux internautes :
BRAVO et MERCI !
Pendant 24h00, toute l'équipe était soudée pour opérer cette remontée fantastique après la terrible percussion subie dans le premier enchainement du premier tour …
Les pilotes, bien sûr, réguliers, homogènes, combatifs …
Le technique au sens large (mécanos, gestionnaires des pneus, chronométreurs, ravitailleur, pompier, …). Ils étaient toujours calmes, précis, et d'une efficacité redoutable sous la férule d'un stratège hors pair, Fred Protat …
Mais aussi Hélène et Marie (Ostéo et Kiné), présentes en permanence pour entretenir les corps malmenés des pilotes, et ainsi permettre la poursuite de l'aventure, dans des conditions optimales …
Sans oublier les joyeux drilles de la logistique qui approvisionnaient toute l'équipe des mets et boissons nécessaires au maintien de la performance …
Un grand bravo donc à toutes ces femmes, à tous ces hommes qui n'ont pas failli devant le coup du sort et qui, au contraire, ont relevé le défi, tous ensemble pour ce résultat initialement inespéré …
Une grosse pensée aussi pour nos partenaires sans lesquels toute cette aventure n'aurait pas vu le jour.
Pour terminer, n'oublions pas les initiateurs de cette magnifique équipée, ceux qui ont eu le courage de créer ce team et la volonté d'évoluer en s'entourant de bonnes personnes, Fabienne et Ludovic !
Tous ensemble, nous avons combattu et vaincu l'adversité …
Alors un immense merci à tous, y compris à nos nombreux supporters.
Enfin, cette superbe vidéo réalisée par notre "Geekette" Jade Van Goethem, retraçant Le Mans 2019 des six teams supportés par Nonocam :
Et quelques vues de la #38 en piste ... Merci Florian !